| Lorsque nous �coutons
en profondeur cette parabole de la brebis perdue, nous
sommes propuls�s dans une d�cision concernant
la profondeur de la vie et nos propres mod�les
de vie. En tant qu’�tres humains, nous ne
sommes pas con�us pour saisir l’essence
de Dieu. Dieu est impossible � conna�tre
et aucune des cat�gories de notre esprit ne peut
aider � l'expliquer. Toutes les principales religions
s’accordent sur ce point.
Et cependant, dans la religion chr�tienne, il
est possible de conna�tre Dieu en termes humains
car Dieu s’est fait homme pour venir parmi nous
et ��il nous est ainsi donn� de le
conna�tre dans la langue famili�re de l'exp�rience
humaine. J�sus n'a pas v�cu une existence
parall�le en marge du monde. Il a plong� dans
notre monde pour le transformer par Sa mission.��
Ainsi, en J�sus, nous savons que le Dieu incroyablement
myst�rieux, ��dont le pouvoir explosif
propulse les galaxies dans l’univers est le m�me
que celui dont le tendre amour enveloppe les d�sh�rit�s,
les d�poss�d�s, les rejet�s
de la terre��. Aucune parabole n’exprime
cette v�rit� radicale, d�concertante
m�me, plus clairement et d’une mani�re
aussi peu �quivoque que la parabole du Bon Pasteur.
Lorsque nous parlons de spiritualit� ou de chemin
spirituel, nous parlons du moment o� nous commen�ons � saisir
la nature de la r�alit� et commen�ons � aimer
cette r�alit�. Au cours d’une vie,
c’est comme nous le dit Annie Dillard, ��le
difficile revirement du coeur, le lent apprentissage
du cœur���: la mani�re d’aimer
et qui aimer.
Alors que nous ne sommes pas ��faits�� pour
saisir qui est Dieu, nous sommes en revanche ouverts
au myst�re. Nous sommes cr��s avec
un sentiment lancinant ��d’inachev�,
d'incomplet, de vide�� au coeur de soi. Nous
sommes radicalement ouverts au myst�re et y sommes
conduits par notre soif de quelque chose de plus, de
quelque chose d�passant ��la prison
du moi��.
Les paraboles de J�sus nous permettent d’entrevoir
le myst�re de Dieu en faisant voler en �clats
nos perceptions fig�es de la r�alit� et
en les bouleversant. Les paraboles donnent une latitude � Dieu
dont la compassion est toujours une surprise, toujours
un choc pour notre imagination.
La parabole du Bon Pasteur arrive rapidement � la ��moelle
spirituelle��. Elle ne compte que cinq phrases.
Le th�me de cette parabole de la brebis �gar�e,
comme de celle de la pi�ce perdue et du tr�sor
perdu, est le ��retour au bercail��,
la victoire sur l’�garement. C’est
trouver et �tre trouv�, trouver Dieu et
d’�tre trouv� par Dieu. C’est
la nouvelle spirituellement �tonnante que Dieu,
par l’interm�diaire de J�sus, a caus� notre ��retour
au bercail��. Cette parabole traite de notre
r�conciliation avec le myst�re saint, avec
le sacr�.
Lorsque nous commen�ons � accepter ce ��retour
au bercail��, notre lib�ration s’op�re � deux
niveaux, celui du � revirement difficile de notre
cœur�� de notre conversion personnelle
et celui de notre transformation sociale. Nous nous tournons
vers Dieu, comme gouvernail dans la vie et vers les autres
dans un service compatissant. Une relation profonde avec
Dieu nous pousse toujours � sortir de nous pour
nous mettre au service des autres.
J�sus nous am�ne au ��lent
apprentissage du cœur���: qui aimer
et comment aimer lorsqu’il demande ��Que
pensez-vous ? Imaginez qu’un homme poss�de
cent brebis. Si l’une d’entre elles s’�gare,
ne laisse-t-il pas les quatre-vingt dix-neuf autres sur
la colline pour partir � la recherche de celle
qui s’est perdue ?�� L�, il fait
le contraire de ce que nous attendons. Le mat�rialisme
tapageur de notre �poque nous am�nerait � tirer
la conclusion inverse. Pourquoi laisser les 99 ? Cette
parabole nous surprend en s’en prenant � ��notre
tendance constante � faire des distinctions, mettre
des limites, �tablir des hi�rarchies, conserver
la discrimination�.� L’�vangile
fait tomber toutes les barri�res. ��La
conversion des cœurs est le grand facteur d’�galisation �.�
Laisser les 99 au profit de ��l’unique��,
c’est comprendre notre parent� avec tous
les �tres humains. C’est comprendre que notre
salut et notre lib�ration sont profond�ment
li�s au salut et � la lib�ration
des ���gar�s��, des
pauvres, des mis � l’index, de ceux qui
sont laiss�s aux zones grises de la soci�t�.
Lorsque nous entendons dans cette parabole la pr�f�rence
que manifeste Dieu-Pasteur pour sa brebis �gar�e
et son d�lice de la retrouver, nous apprenons
la v�rit� myst�rieuse pulv�risant
les limites, que les pauvres, les marginalis�s,
les laiss�s pour compte sans espoir sont profond�ment
aim�s par Dieu. J�sus nous explique tr�s
simplement: ��Ce n’est pas la volont� de
notre Dieu-P�re que l’un de ces petits soit
perdu��.
Lorsque nous �coutons le sens profond de cette
parabole de la brebis �gar�e, nos sommes
pouss�s � prendre un d�cision concernant
la profondeur du sens de la vie et de nos propres habitudes
de vie.
Cette parabole est une invitation � participer
au projet de Dieu pour l’humanit� que nous
appelons le r�gne de Dieu. Le r�gne de
Dieu est le lieu o� s’est produite la conversion
dans nos cœurs et sur la terre, o� le ��lent
revirement du cœur et le lent apprentissage du
coeur��, la mani�re d’aimer et
qui aimer, a lib�r� l’�nergie
la plus puissante de l’univers�: l’amour
de Dieu r�pandu sur la terre.
— Soeur Helene Hayes, sœur
apostolique |